Je viens d’avoir un coup de fil, "plus qu’improbable", qui montre avec quel soin et attention des journalistes peuvent trouver et choisir leurs invités….
Et il ne faut pas s’étonner qu’avec un travail de telle qualité on n’obtient que des émissions très caca boudins, où on parle de tout de n’importe quoi, mais pas franchement de la réalité (cf complément d’enquête spécial adoption par exemple).
Je reçois très souvent des demandes de journalistes, qui voudraient que je leur trouve des familles pour venir témoigner, si possible pour faire pleurer dans les chaumières ? et bien entendu je les éconduit, sauf dans de très (trop) rares cas, où on me présente des projets vraiment intéressants qui pourraient réellement rendre service à l’adoption, il m’est arrivé de faire des promos sur mon blog …. Et ça n’est vraiment pas arrivé souvent, vous pouvez en témoigner !
Aurait-on en France la télé que l’on mérite ?
Une journaliste de « Toute un Histoire » vient de m’appeler pour me demander si j’étais d’accord pour participer à son émission. Je réponds que sur le principe, je veux bien, mais qu’il ne sera peut-être pas facile de trouver une date….
Mais je préfère accepter de perdre un peu de temps plutôt que de laisser la place à un spécialiste qui se lance dans de grandes théories, riche de son expérience d’au moins 17 adoptés suivis. On sait le mal qu’ils ont pu faire !
Premier soupçon, elle me demande si je suis médecin, deuxième question, si je suis chirurgien (ouais, bien sûr, le chirurgien des adoptés, c’est moi, le spécialiste de l’appendicite du vietnamien, le roi de la vésicule biliaire du colombien)…. la méfiance s’éveille…
Ensuite, elle me parle de mes enfants, les faits-maison, les adoptés, en me demandant dans quel sens je les ai eu (je ne crois pas qu’elle parlait de voie basse ou césarienne… ni même de kamasoutra)… la méfiance monte...
Comme, je lui fais remarquer que ce n’est pas très intéressant de parler de mes enfants… « Ben pourquoi ? », « Et bien j’ai trois adoptés, à peu près sages, à la maison, et j’en ai 2500 à la consultation, donc c’est peut être mieux de profiter de mon expérience ». Elle m’explique alors, que le spécialiste de l’adoption, ils l’ont déjà en interne, et que je les intéresse juste comme père de famille nombreuse avec des adoptés…
Vous imaginez le choc, pour moi, c’est comme si Saint-André (celui de l’équipe de France de rugby, pas le frère de Saint-Pierre) m’appelez pour me demander de venir jouer pour l’équipe de France… mais qu’au fil de la conversation, je découvre que c’est pour être ailier (moi dont le record au 400m, doit être de 283m). Ou que Luc Besson, me demande de jouer dans son remake de « Sans Famille », mais pas pour faire Vitalis, pour faire Rémi… ou encore que Colline Serreau me déclare qu’elle me veut absolument pour sa nouvelle version de 3 hommes et un couffin, mais pour faire le couffin, ou enfin que Jean-Jacques Annaud ne rêve que de moi, dans son grand film sur Heidi, mais pas dans le rôle du grand-père, dans celui de la chèvre.
Comme je lui explique, que je n’interviens que comme spécialiste, et que je pense que la taille de ma consultation, le nombre de mes publications, de mes formations diffusées, me le permettent…. Elle me répète que le spécialiste, ils l’ont déjà et qu’il pourra me donner des conseils par rapport à ma vie de famille… le fou rire a été difficile à retenir.
Je me suis aussi retenu (très fort) de lui demander si quand elle avait Usain Bolt sur le plateau, elle faisait venir un copain sophrologue pour lui expliquer comment se décontracter avant de courir, ou si pour Jean d’Ormesson, c’était le prof de français de sa fille qui viendrait lui donner des conseils pour sa prochaine rédaction…
Je me suis excusé très poliment (sans ironie, je reste presque toujours poli) de mon manque d’expérience et de ne pas être parisien et la discussion s’est arrêtée là !
Je pense qu’elle me recontactera comme spécialiste pour les prochains défilés de mode, je vais aussi tenter de postuler pour la coupe du monde de foot. En avant-première, vous pouvez même voir notre premier commentaire commun,
en cliquant ici. Non, ce n’est pas moi, la blonde.
Cela pose quand même deux réflexions sur le journalisme, par rapport au sujet qui nous tient à cœur (mais malheureusement cela doit être le cas pour bien d’autres sujets) :
1- le manque de sérieux, de rigueur dans leur recherche d’information. Elle me dit qu’elle a trouvé les infos sur mon blog…. Je crois qu’il faut pas aller bien loin sur mon blog pour voir à qui on a à faire (tiens si elle revient elle verra qu’on parle d’elle)… mais elle a trouvé le moyen de s’arrêter avant, juste à la première portion de petit bout de début de phrase : père de 5 enfants, dont 3 adoptés. Je ne suis pas un méchant avec « mes » jeunes que je dois former (du moins je l’espère, et sinon, ils ne me demanderaient pas tous de faire leur thèse avec moi), mais un de mes internes qui aurait fait un aussi gros hors-sujet, sur un dossier ou des examens, je ne vous parle pas du savon, auquel il aurait eu droit.
2- Ce qui intéresse, c’est le premier pingouin venu et non pas quelqu’un qui a l’expérience. Dans les derniers reportages sur l’adoption, dans compléments d’enquête et dans La Croix (journal qui m’avait habitué à beaucoup mieux), on n’a pas vu des associations représentatives comme Racines Coréennes ou La Voix des Adoptés, mais un monsieur (le même à chaque fois) qui a été victime d’une adoption cata, je le respecte entièrement, il a tout à fait le droit de s’exprimer, d’écrire un livre, mais je respecte moins les journalistes qui nous le présente comme l’adopté type, c’est son histoire à lui, elle existe bien, mais reste (fort heureusement) atypique et il est dangereux de la généraliser ! De la même façon, c’est beaucoup mieux quand on a besoin d’un père adoptif de prendre le confrère journaliste (le p’tit frère de PPDA par exemple) plutôt que la présidente d’EFA, ou le président du MASF ! On reste entre amis… et puis sur les 4 assoc que je viens de citer, il y a au moins deux président(e)s qui ont un accent méridional… ça fait pas sérieux !
Comme disait Louis XVI à Varennes : on n’est pas sorti de l’auberge !