jeudi 26 février 2009

Drépanocytose, anémie falciforme...

C'est la même maladie avec plusieurs noms. On va essayer d'expliquer assez simplement. On a tous du sang, dans le sang, les globules rouges, dans le globule une grosse molécule qui s'appelle l'hémoglobine. Cette hémoglobine est constituée de deux chaînes. En principe c'est deux chaînes AA, on est AA.
Parfois il y a d'autres chaînes, dont notamment la chaîne S.
Si on est porteur d'une chaîne A et d'une chaîne S on est AS ! Rien de bien méchant, on a des globules rouges plus petits que la moyenne mais en nombre suffisant et gros avantage on a une défense naturelle vis à vis du paludisme (pas à 100%, faut pas rigoler et laisser tomber la prophylaxie). Conséquence de la loi de l'évolution, dans les endroits où il y avait du palu, les AS résistaient mieux que les AA, ils survivaient plus longtemps (le palu est un grand tueur) ils avaient plus d'enfants. Donc cette anomalie S s'est développée dans certains coins très impaludés, en particulier l'Afrique du Nord et sub saharienne (ne pas oublier les descendants des africains en Amérique) mais aussi en Sardaigne, zone très impaludée, où il y a eu aussi des vikings (moins qu'en Normandie ou qu'en Sicile mais quand même pas mal) donc on peut être blonds aux yeux bleus et drépanocytaire.

Le problème c'est quand Mr AS et Mme AS ont des enfants ensemble. Sur 4 enfants, ils auront statistiquement 2 AS comme eux, un AA, et un SS.

Celui là aura des soucis, car en cas de stress, de coup de chaud, de coup de froid, de déshydratation, ses petits globules rouges font changer de forme au lieu d'être grosso modo sphériques, ils vont prendre une forme de faucille, et ne plus pouvoir passer dans les petits vaisseaux, notamment osseux et provoquer des crises douloureuses majeures+++ Ils seront aussi un peu plus fragiles vis à vis de certaiens infections. Il y a encore une trentaine d'années, ils mourraient tous dans l'enfance. Les prises en charge par les services d'hémato pédiatrie sont bons et ils peuvent maintenant mener une vie presque normale. Je me souviens quand j'étais interne dans un tel service à Marseille, d'un jeune homme d'origine antillaise, dont on s'occupait et avec qui j'avais bien sympathisé. Le mec adorable, chef scout, joyeux, heureux de vivre, altruiste, brillant dans ses études... super quoi... sauf une ou deux fois par an, hospitalisé et mis sous des doses de cheval de morphine, une hyperhydratation et de l'oxygène sous le nez, pour ne plus avoir mal. Il restait quelques jours complétement dans le coaltar.

En résumé :

AA = Normal

AS = drépanocytose hétérozygote, ou mineure ou porteur sain : très peu de risques de crises douloureuses sauf dans des conditions extrêmes : sport de très haut niveau en très haute altitude ou l'oxygène est rare. evitez le marathon de Katmandou ... Préférez le semi marathon de Paris avec l'APAEC. Se méfier à l'âge d'enfanter que le conjoint ne soit pas lui aussi porteur.

SS = drépanocytose homozygote ou maladie ou majeure : risque de crise fréquent, nécessité de recevoir des antibiotiques au long cours et de la prévention.

J'espère avoir été clair, il existe des sites de parents d'enfants porteurs de ces anomalies pour ceux d'entre vous qui voudraient avoir des renseignements de parents à parents, tout à fait utile dans la vie quotidienne.

mardi 24 février 2009

Accueil n°150 Numéro exceptionnel

En verve le docteur ce jour, juste une page de publicité pour vous signaler la sortie prochaine du numéro 150 de la Revue Accueil, la revue de l'association incontournable de l'adoption : Enfance et Familles d'Adoption.

Le titre de ce numéro sera Grandes et Petites Histoires de l'Adoption. J'en raconte des grandes, avec un article assez proche de celui écrit récemment pour une revue de pédiatrie (ni banalisation, ni stigmatisation paru dans ce blog) et j'en raconte aussi des petites que je garde secrètes jusqu'à la parution du numéro.

J'en profite pour dire un grand bonjour au rédac chef de cette sympathique revue l'encore plus sympathique Jean-Gabriel !

Bienvenue à tous

Manava ou Maeva (deux formes de bienvenue polynésiens, celui qui trouve la différence entre les deux gagne un permis de chasse aux trolls).
Maururu (litt. je suis content, forme de remerciement polynésien) à Marraine la Bonne Fée qui m'a modernisé mon blog. Elle a dû voir Shrek 2 et elle sait que ce terme est peu flatteur mais j'aime bien la taquiner et je la remercie vraiment de ce qu'elle a fait pour ce blog.

Bienvenue à tous qui êtes aussi nombreux, les vieux, mon fidèle Bernardo, dont j'espère que la truculence et le franc parler sans censure seront souvent présents et feront du bienà ce blog. L'occasion de saluer par sa personne encore et toujours les APPO qui font vraiment du bon boulot.

Une bienvenue encore plus prononcée aux jeunes, aux adoptés, la parole est à vous, c'est bien pour cela que Racines Coréennes est mon association préférée, celle qui doit être la plus proche de la vérité puisqu'ils ont vécus ce dont ils parlent. Bienvenue dans cette catégorie à Kim, Cundina et Céline la fondatrice de La Voix des Adoptés. Faites vous entendre dans les médias, faites vous entendre sur ce blog.
Je suis à fond pour les assoc d'adoptés ados ou adultes, cela vous permet de vous faire entendre de manière plus collective, de rétablir des vérités quand les médias ne retiennent que quelques histoires complétement véridiques mais tout à fait particulières....

J'avais été ravi il y a environ un an, à l'issue d'une réunion du CSA, j'étais allé manger avec trois grands adoptés, il avaient bien voulu d'un vieux comme moi, c'était Julien qui a fait une magnifique thèse avec moi, la représentante de Racines Coréennes et la pétillante et sympathique vice-présidente de EFA pour l'international (excuse moi miss j'ai mangé ton prénom)...

Adoption en Polynésie et défenseur des enfants

Un sujet d'actualité puisque Madame Dominique Versini a présenté récemment, un rapport au Comité des Droits des Enfants aux Nations Unies, à Genève.
Dans ce texte très intéressant, on trouve quelques mots (une page) sur l'adoption en Polynésie. J'en ai été tenu informé par plusieurs sources, soit "mon" réseau polynésien, soit le réseau adoption. Pour prendre connaissance de ce texte suivre le lien suivant puis aller vers la page 46 :

http://www.defenseurdesenfants.fr/pdf/Rapport_Geneve.pdf

Ceux qui ont lu mon livre savent que la Polynésie est pour moi quelque chose de très important : sur le plan familial mes trois aînés sont nés aux Iles-sous-le-Vent, sur le plan pédiatrique, j'ai été il y a quelques années le pédiatre de Raiatea et sur le plan anthropologique les îles de Raiatea et Maupiti ont été mes terrains de recherche. Le mode d'adoption polynésien peut tellement surprendre qu'il nous permet de comprendre beaucoup de choses sur l'adoption en général (c'est bien le but de l'anthropologie).
Même si personne ne me l'a demandé, je tenais à donner mon avis sur ce texte, avec lequel je suis presque complétement d'accord.

Paragraphe 100 : l'instabilté politique de la Polynésie gêne tout développement de la politique de l'enfance. Effectivement depuis 5 ans, les gouvernements valsent à une vitesse démesurée avec des alliances plus que surprenantes parfois ! Le dernier date d'une semaine...on n'en a même pas parler en métropole. Un espoir toutefois, dans ce noveau gouvernement, je connais un peu la nouvelle ministre de la famille polynésienne (Madame Merceron) et je pense qu'elle aura à coeur de faire avancer ces sujets.

Paragraphe 101 : le don d'enfants est évoqué, c'est le terme consacré en Polynésie, la façon dont parle les polynésiens. Je tiens toutefois à préciser que s'il y a bien un don dans les adoptions en Polynésie, il s'agit dans la plupart des cas (surtout en cas d'adoption par des métropolitains) de don FAIT à l'enfant. Ses parents bio n'ont pas les moyens sociaux ou économiques de s'en occuper et ils lui cherchent une famille. Leur pensée est "Mon enfant, je t'aime, je ne peux te garder, je vais chercher ceux qui pourront te rendre heureux, et te donner un meilleur avenir", en ce cas, les métropolitains peuvent comprendre qu'ils ne doivent pas faire de démarchage intensif, mais à faire connaître leur désir d'enfants et leur amour des enfants... semer pour attendre la bonne nouvelle qui risque de mettre du temps à venir sans doute, mais qui ne sera pas un espèce de viol des consciences, des pressions évoquées par la défenseur des enfants !
Alors que si on croit qu'il s'agit de dons d'enfants (possible et encore fréquent à l'intérieur de l'ethnie polynésienne), on peut vite imaginer la pensée des parents bio comme "Je ne suis pas attaché à mon enfant, je vais en faire cadeau à quelqu'un" et dans notre pensée occidentale plus mercantile que la société polynésienne on croiera vite "S'ils sont capables de donner leurs enfants, peut être les vendront ils ?". D'où un démarchage qui fut souvent maladroit et parfois scandaleux. En 2002, quitte à me faire haïr par certains, j'avais conseillé aux polynésiens de mettre quelques barrières autour de l'adoption. Car cela pouvait être du n'importe quoi : des postulants débarquant dans des chambres de maternité auprès de jeunes accouchées qu'ils ne connaissaient même pas pour leur proposer d'adopter leur enfant (parfois moyennant finance...). J'imagine quelqu'un faisant cela dans la maternité qui est au bout du couloir de mon service de pédiatrie !
C'est une maman elle même métisse, me décrivant que se promenant sur le marché de Papeete, avec son enfant de quelques mois (adopté qui plus est , cela pourrait être un gag) se voit apostrophé par des métropolitains qui lui propose d'adopter cet enfant, qu'avec eux il sera bien traité ??? Allez faire cela sous les halles de Dijon, avant de l'envisager en Polynésie. Vous me raconterez ce qui va vous arrivez....
Les polynésiens aiment leurs enfants, parfois pensant qu'ils ne pourront les assumer ils envisagent des les confier à d'autres pour leur promettre un meilleur avenir... Mais les choses changent, Tahiti et ses îles ont été un des rares endroits où on pouvait adopter des tous jeunes enfants et trop de postulants se sont bousculés. Si la plupart ont accepté les règles du jeu, certains sont passé du côté obscur, et il suffit d'une adoption désatreuse pour salir 100 adoptions propres, on retiendra plus le bébé vendu aux enchères que la belle histoire de confiance entre deux familles... La société polynésienne change, elle s'occidentalise et certains polynésiens peuvent prendre des mauvaises habitudes, ce sont rarement les parents biologiques mais plus des personnes en qui ils croient avoir confiance qui jouent les intermédiaires véreux et jouent le jeu financier de certains postulants.
Les conséquences en sont que beaucoup de polynésiens ont perdu confiance dans les métropolitains qui veulent adopter et que certains comportements (comme revenir sur sa décision) qui étaient rarissimes deviennent fréquents. Ajoutez à cela le développement de la contraception et de l'IVG et vous comprendrez que l'adoption en Polynésie devient de plus en plus rare et périlleuse.

Comme Madame Versini le dit dans son chapitre 103, c'est aux Polynésiens de prendre les décisions pour faire évoluer l'adoption dans le sens qu'ils le veulent en respectant leur tradition d'adoption plusieurs fois centenaire et en l'adaptant aux évolutions d ela société polynésienne. Le reste serait du colonialisme ! Ce n'est pas nous les gaulois avec notre jeune loi de 1966 qui allons leur expliquer l'adoption !
Par contre je ne suis pas du tout d'accord du point de vue de Madame Versini de privilégier l'adoption simple. La différence entre les deux modes d'adoption est une question d'héritage, rien d'affectif là dedans, et quand on explique clairement aux polynésiens la différence entre les deux ils choisissent l'adoption plénière.... mais ce sera l'occasion d'un nouveau post sur ce gros marronier qu'est la différence entre ces deux modes d'adoption... Le choix du mode d'adoption n'a rien à voir avec la fin de son paragraphe sur le respect mutuel et l'envoi de nouvelles que j'approuve à 200%.

Rien à dire sur le paragraphe 104, mais la décision appartient, une fois encore, aux polynésiens, et j'ai confiance en eux pour faire évoluer l'adoption en évitant les dérives et en respectant les traditions polynésiennes (du choix de la famille adoptive par exemple).

J'ai confiance en deux grandes dames pour cela : la ministre de la famille du nouveau gouvernement polynésien : Madame Merceron, et l'ancienne député de Polynésie Française, ancienne assistante sociale qui considère ce sujet comme majeur : Madame Vernaudon.

jeudi 19 février 2009

Semi marathon de Paris

N'espérez rien mon double semi quintal ne fera pas le semi marathon de Paris.
Mon record du semi marathon devant se limiter à 1200m.

Jusqu'à maintenant, je ne voyais pas l'intérêt de courir sans ballon (j'en profite pour rappeller qu'un ballon d'une autre forme qu'ovale n'a pas lieu d'exister).

Mais tréve de plaisanterie voici une proposition sympathique :

Deux personnes que j'aime beaucoup, deux grands amoureux de la Colombie où sont nés leurs "petits" : celui que j'ose appeler mon fidèle Bernardo (cf mon post sur lui) et Guylaine Roujol-Perez,(l'auteur des supers livres un aller simple Cali-Paris et des Enfants de Cali), profitent de cet évenement sportif pour une action de solidarité entre la France et la grande ville colombienne de Cali.

Vous pouvez les aider en allant courir ou en les soutenant finacièrement.

Je ne sais pas comment mettre un lien avec le fichier pdf qu'il m'envoie (je sais je suis nul) donc allez sur leur site : http://www.enfantsdecali.com/ ou http://www.apaec.fr.st/

samedi 14 février 2009

Envoyé spécial à l'Elysée

Votre humble chroniqueur était invité hier à l'Elysée. J'ai découvert de l'intérieur notre palais présidentiel, et j'ai écouté en avant première le discours de notre président que je ne commenterais pas hormis vous dire que j'ai apprécié qu'il commence par dire que l'autorité et l'affection étaient des choses importantes à transmettre dans les familles. Pour ma part c'est un peu ce que je dis aux familles quand des enfants arrivent, beaucoup d'amour, de rassurance mais en pas oublier la fermeté et de donner des limites à nos petits.
Les limites c'est frustrant mais c'est rassurant et ça aide à grandir.

Sur l'adoption, le président a rappelé combien ce sujet lui tenait à coeur et combien il était nécessaire de continuer à aider les familles qui veulent adopter et qu'il avait demandé à l'AFA de s'appuyer sur les associations qui avaient l'habitude (les OAA je suppose ?) en disant à propos de l'AFA : "... ça dort un peu..."
Il a aussi évoqué encore les enfants de France qui ne peuvent être adoptés....

J'ai pu aussi parler avec Madame Morano, dont je suis de plus en plus persuadé de deux choses, sa sincérité et sa générosité.

J'ai aussi beaucoup parlé avec Mr Monchau l'ambassadeur de l'adoption dont j'apprécie vraiment beaucoup la modestie et la qualité d'écoute.

.... très fayot Zorro le météque ce soir, mais je dis ce que je pense et quand des gens pensent avant tout aux enfants cela me plait !

Le dossier russe

Idée lumineuse, pour vous faire gagner du temps, et m'en faire gagner aussi, plutôt que tout écrire, j'ai déjà tout dit lors d'une conférence de l'APAER (Association des PArents Adoptifs d'Enfants Russes) et le lien ci-joint vous dira tout. Pour le dossier russe il faut aller juste après le gros titre LA SANTE EN GENERAL

C'est l'occasion de saluer cette sympathique association que j'ai vraiment bien aimé et notamment la dynamique Katia, encore une maman d'un sympathique Zorro.

http://www.apaer.org/reunion_conference_de_monleon_0604.html

PS : je voulais aussi trouver le lien de l'association Adoption Russie (autre sympathique association) pour qui j'avais aussi fait une conférence et qui l'avait mis sur son site, amis je n'ai plus trouvé trace de cette conférence sur leur site.

Libé encore

Le quotidien Libération m’ayant beaucoup interviewé ces temps derniers, à propos de la santé des enfants adoptés et des réformes à venir sur l’adoption, je suis devenu « leur pédiatre référent ». Ils me demandent des avis sur l’alcoolisme, les ados etc… ils m’ont récemment demandé mon avis sur le un problème bien hospitalier : le codage et j’ai pondu un petit article, je n’apprend qu’aujourd’hui qu’il est sorti jeudi :


http://www.liberation.fr/societe/0101318892-soigner-ou-coder

A lire toutefois en préambule sur une article sur les dossiers russes que je vous écrirai bientôt.

jeudi 12 février 2009

A l'assaut du tribunal pour changer l'âge

Chers Amis, chers Lecteurs,
Il s'agit sans doute du dernier message, mon blog ne va pas tarder à être interdit, dans les lignes suivantes, je vais allumer deux magistrates et il est toujours dangereux de s'attaquer à la justice.....

Bien entendu et je plaisante et dans notre pays de gaulois, nous avons bien le droit de râler. Je tiens à dire que la plupart (plus que cela : l'immense majorité) des juges font extrêmement bien leur boulot. L'erreur aussi est humaine, il faut le rappeler, mais certains ont moins droit à l'erreur que d'autres, nous les médecins parce que les conséquences peuvent en être dramatiques, mais aussi quand c'est un juge qui se trompe, car on n'a pas le droit de lui dire, et qu'ils sont plus difficilement condamnables. Je m'excuse par avance auprès de mes amis magistrats, si si je l'avoue, j'ai de bons amis qui sont magistrats et qui font très bien leur travail, je m'excuse aussi auprès de tous les juges qui ne sont pas mes amis mais qui font tout aussi bien leur travail et qui sont, je le répète, une majorité écrasante. Mais l'histoire que m'a raconté, hier, une famille, nécessite d'être connue.

Par respect pour cette famille, elle restera anonyme.

Cela fait environ un an que cette fratrie a été adoptée, sans être spécialiste, dès le premier coup d'oeil il est évident que les enfants n'ont pas l'âge annoncé sur leur passeport. Chacun d'entre eux (ils sont trois), a entre un et trois ans de plus que leurâge officiel. Après un suivi de 6 mois où j'ai beaucoup plus d'éléments, je peux confirmer cela de manière plus nette..... pour mémoire, je vous promets d'ici peu (ou pas trop longtemps) un message bien médical sur "comment déterminer l'âge d'un enfant".
En résumé il faut savoir que c'est tout un faisceau d'argument, un suivi sur plusieurs mois et qu'on ne le fait pas à la légère.
Quand l'erreur est évidente et dans l'intérêt de l'enfant (permettre d'être dans sa classe d'âge à l'école, d'être mieux intégré, etc) on peut proposer un changement de date de naissance. Il est souvent plus pratique de le faire au moment de la validation de l'adoption, car ensuite, cela peut engager des complications, des frais (nécessité d'avoir un avocat, etc...).

C'est ce qu'a tenté de faire cette famille il y a quelques jours, ils étaient assez confiants, munis d'un certificat de ma part précisant mon habitude dans le suivi des enfants adoptés et dans ce problème particulier, d'un courrier de la psychologue scolaire précisant là aussi combien l'erreur d'âge était évidente et de la directrice d'école, dame pleine d'expérience qui confirmait tout cela. Ils avaient aussi les preuves que le pays d'origine utilise un autre calendrier et que la conversion n'est pas évidente. Ils avaient aussi amener les enfants pour que les magistrats puissent constater d'eux mêmes tant c'était évident. Dans la plupart des tribunaux de France, cela serait passé comme une lettre à la Poste...
Pas dans celui-ci. Ils sont tombés sur deux juges, dont ils soulignent la jeunesse, et manifestement l'inexpérience, l'adoption a été prononcée sans aucun problème, mais pas le changement de date de naissance. La juge n'a pas voulu se laisser convaincre, même quand on lui a montré le certificat de vaccination du pays d'origine où les dates inscrites montrent que certains vaccins auraient été fait plusieurs mois voir plusieurs années avant la naissance ??? Elle a regardé les enfants quand les parents l'ont supplié de les regarder et de dire si à son avis ils avaient les âges annoncés, mais cela ne lui a rien inspiré, sans doute ne voit elle pas beaucoup d'enfants. Elle n'a rien répondu quand les parents lui ont demandé d'expliquer à leur aînée qu'elle devrait retourner en Moyenne Section de maternelle vu l'âge qu'on lui attribue, alors que malgré le récent changement de lieu, de langue, de méthodes scolaires, elle suit très bien en CP et qu'elle doit avoir plutôt l'age moyen des CE1 !

Quant à la procureur, elle n'a levé les yeux du document qu'elle feuilletait, que pour jeter un "il faut demander une expertise".

L'audience était finie, les parents ont reçus peu après le délibéré, confirmant l'adoption et demandant une expertise pour définir l'âge. L'expertise que j'avais fait gracieusement est résumée en quelques mots laconiques : " le pédiatre consulté pense que les enfants sont plus âgés...", (ce n'est pas que ça fait mal à l'égo mais ça irrite quand on essaie de se donner le maximum de recul et qu'on essaie de faire partager l'expérience acquise), l'avis tout aussi expérimenté de la directrice d'école qui voit des enfants depuis des années est balayé.
Plutôt que de regarder l'avis de gens qui ont l'habitude de voir des enfants, de rares professionnels qui ont l'expérience d'estimer la réalité des dates de naissance, elles ont désignés un expert. Un confrère dont je en doute pas des capacités, mais pour ce sujet. Je suis allé chercher des renseignements sur ce monsieur sur internet, un très brillant professeur de médecin légale, spécialisé dans les autopsies après mort violente ! Le choix de la justice est judicieux. Un Kay Scarpetta français au masculin qui j'espère recevra cette famille avec bienveillance et ne les importunera pas plus.

Tout le monde a droit le de se tromper, encore plus tout le monde a le droit de ne pas tout savoir. Mais quand on ne sait pas, avant de prendre des mesures graves on s'appuie sur l'avis de ceux qui ont plus d'expérience.
Quand l'audience a été finie, ces dames (les magistrates), se sont levées, elles ont dû aller manger un bout ensemble. Peut-être, dans quelques semaines en lisant Elle (je sais je suis très macho de caricaturer comme ça, pourtant j'ai déjà été interviewé dans Elle), voyant un témoignage sur un cas particulier de l'adoption, témoignage sans beaucoup d'intérêt parce qu'il ne raconte qu'un cas unique du style, elles se rappelleront peut-être de cette famille qu'elle ont mis dans la panade sans s'en rendre compte.
Car, oui cette famille est dans la panade. C'est une super famille, des parents sympas, ouverts à l'écoute, des enfants joyeux, qui commencent à bien s'ancrer dans cette nouvelle vie. A cause de cette décision, prise à la légère, ils vont perdre du temps à faire des centaines de kilomètres pour aller voir l'expert, voir d'autres experts désignés par l'expert. Cela aurait été tellement mieux ce temps de le passer à se promener en famille, à visiter un chateau-fort, à faire un jeu tous ensemble. Et puis l'addition risque de leur coûter quelques milliers d'euros. Dans l'imaginaire, les familles adoptives sont très riches, dans la réalité elles ont effectivement plus de moyens que la moyenne nationale. Mais comme la plupart des familles que je vois, il ne s'agit pas d'une famille de milliardaire, l'adoption leur a déjà beaucoup couté, cette somme importante en plus, cela veut dire, la voiture que l'on ne pourra pas changer, les vacances que l'on ne pourra pas prendre...
Et puis cela faire du stress en plus, et même si c'est une super famille, on n'a pas besoin d'un stress qui sert à rien ! Il y en a déjà trop dans l'adoption.

Alors que dans le département voisin, ou peut-être même à l'audience du lendemain avec d'autres juges, tout cela aurait pu être évité.

Je compte sur vos réactions mais aussi sur vos témoignages si vous avez dû changer la date de naissance de votre enfant, et pas seulement si cela s'est mal passé car je sais que la plupart des juges ont un regard tout à fait bienveillant et qu'ils pensent avant tout à l'intérêt des enfants.

vendredi 6 février 2009

La fameuse quête des origines

Voici le premier grand "classique" de l'adoption que je vous avais promis pour 2009.
Si je commence par cela, c'est d'une part que je viens d'avoir une grande discussion sur le sujet avec un rédacteur en chef (que j'aime bien) d'une revue bien connue dans le domaine de l'adoption, ce pauvre ami étant coincé entre un de mes articles et les contre-feux de certains de ses camarades. Mais aussi le témoignage d'une famille, leur pré-ado ayant du mal à l'école, gentiment la professeur principal leur a demandé si cela ne pouvait être cela : toutes les questions que se pose forcément les ados adoptés au moment de l'adolescence.
Très souvent quand les médias parlent de l'adoption ils présentent la quête des origines comme un souci important, un mal-être permanent qui mine la vie des adoptés de tout âge. Les journalistes a la recherche de sujets passe-partout sont aidés en cela par quelques psys (minoritaires) plus près de tonton Sigmund que de leurs patients.
Il y a 6 ans, le ministre de la famille de l'époque m'avait demandé de rencontrer son directeur de cabinet, j'avais dû plaire, quelques jours après on me conviait au Conseil Supérieur de l'Adoption. Nous avions évoqué de nombreux sujets, fait un petit panorama sur l'adoption. Parmi les sujets : un événement alors récent, quelques jours auparavant, il y avait eu une manifestation contre l'accouchement sous X. Manifestation qualifiée d'importante par un journal parigot, arbitre habituel des élégances. Le reportage pendant le journal d'une chaîne de télévision nationale semblait montrer du monde, il y avait un angle serré sur le leader et ils semblaient nombreux derrière lui brandissant banderole et slogans. Le dir-cab avait envoyé les RG, compter les manifestants : ils étaient 13 ! Treize cela suffit pour avoir un reportage au 20 heures, pour être qualifié d'événement important par un quotidien référence !
Dans le même ordre d'idée, je ne suis pas sûr de ce chiffre, mais j'ai entendu un jour que seuls 3% des personnes qui auraient pu avoir accès aux services du CNAOP (Conseil National d'Accès aux Origines Personnelles) ont cherché à avoir des renseignements. Donc 97% des personnes nés sous le secret se fiche de leur origines ?   Pas si sûr.

Parmi les centaines d'ados adoptés que j'ai suivi, beaucoup n'allaient pas très bien, pour tout un tas de raisons qui feront peut être l'objet d'un autre message. Très rarement l'absence ou le manque d'information sur la famille biologique sont mis en avant. Je leur en parle toujours s'ils ne l'évoquent pas systématiquement, la réponse la plus commune : "Ouais si je pouvais les rencontrer (les parents biologiques) ce serait bien, je leur poserais quelques questions mais surtout je pourrais voir comment ils sont. Mais c'est pas mon problème, j'vis bien sans ça". Dans une immense majorité des cas, à la question "Qui est-ce tes parents ?" la réponse désigne les parents adoptifs, même s'ils ne l'avoueront jamais à ces derniers : réalistes mais ados quand même ;-)
Pour des raisons diverses (une adoption qui ne s'est pas bien passé, un inquiétude par rapport à son capital génétique, etc), certains ados ou adultes adoptés ont besoin d'en savoir plus, parfois ils peuvent être obsédés par cette quête. J'en ai rencontré, j'ai même parfois aidé certains dans leurs recherches. Ce désir doit être respecté.
Que certains, soient très malheureux de ne pas connaître leurs origines, hurlent leur douleur n'est pas anormal, quand on souffre cela fait parfois du bien de hurler sa souffrance, de tenter de la généraliser, pensant que plus on est nombreux à avoir mal, moins la douleur sera forte. Ce qui me gêne beaucoup plus, c'est le traitement médiatique (et parfois politique) du phénomène. Ce sont ceux qui se croient bien rassurés, bien normaux, car ils savent qui est pôpa et môman, leur vrais papa et maman (car chacun sait que les parents adoptifs sont "pour de faux") qui plaignent les pauvres petits adoptés ..... la pitié, le misérabilisme sont des formes terribles de mépris, et c'est tous les adoptés qui doivent le vivre !

A vos commentaires !