jeudi 16 octobre 2008

Lait frelaté chinois

Quelques parents inquiets, à juste titre, m'interrogent sur le risque du lait frelaté chinois. Lequel aurait été mélangé de la Mélanine afin de rendre moins évident le fait que ce lait a été coupé avec de l'eau..... encore une preuve des bienfaits du totalitarisme à outrance !

Je joins l'adresse du message de l'institut de veille sanitaire sur le sujet, le risque ne doit pas être écarté chez des enfants qui arrivent de Chine ou qui en sont arrivés récemment. Il convient de vérifier la fonction rénale par dosage dans le sang de l'urée et de la créatinine, et d'évoquer la présence de calculs rénaux en cas de douleurs abdominales. Pour une fois ce ne sera pas forcément les parasites et il sera nécessaire de faire une échographie.


http://www.invs.sante.fr/display/?doc=presse/2008/le_point_sur/melamine_141008/index.html

mercredi 15 octobre 2008

On Strike

Demain je suis en grève pour la première fois de ma vie, voici le mail que j'ai envoyé au syndicat des pédiatres hospitaliers qui nous proposait de distribuer un tract quant à notre retraite :

Personnellement je vais faire la grève pour la première fois de ma vie mais je ne distribuerai pas ce tract demain (ni celui du SNPEH, ni celui des anesthésistes), je le trouve trop « CGT », trop « SNCF » ; et si je suis admiratif quant à leur « expérience » je ne tiens pas à leur être comparé pour mon dépucelage !

Je ne demande pas un nouveau tract mais voila ce que j’exprime aux familles et aux membres du personnel qui m’interroge sur cette grève :

1- Il est clair que nous défendons notre retraite, et il est nécessaire de préciser qu’on nous demande un sacrifice qui n’a pas été demandé à d’autres.
2- Notre salaire est certes tout à fait correct (je n’ai pas honte de le dire, et les gens sont souvent surpris, nous imaginant tous de grands nantis) mais il y a 10 ans d’étude, 2 ans de clinicat payés au lance-pierres, des responsabilités, des stresses bien au-delà de la moyenne des autres professions. Je suis surpris par les revenus de certains amis (qui exercent des fonctions dans le domaine de la gestion ou du commerce) pour des niveaux d’étude, de responsabilité et d’heure de travail bien inférieurs.
3- Je n’ai pas encore parlé du nombre d’heure de travail : ma semaine se finit vendredi matin (après une garde où j’aurai été réquisitionné) et je viens de calculer cela fera 77 heures de travail depuis le vendredi matin précédent, sans compter les quelques publications et lectures d’articles que j’ai effectué en plus, à mon domicile !
4- Je ne me trompe pas de combat, je ne me sens aucune solidarité vis-à-vis de certains autres professionnels de santé (médecins ou non) et de leurs honoraires. Je reçois pour le domaine où je fais référence (l’adoption) des enfants de toute la France et je n’ai jamais voulu demander le moindre dessous de table ou dépassement d’honoraire (je fais bien la différence entre les deux). J’ai une consultation qui n’est que publique et qui ne me ramène aucun sou. Je pleure quand je vois ce que je débourse depuis quelques années et pour quelques années encore à l’orthodontiste qui fait un beau sourire à mes enfants. Il fait bien son boulot, mais pourquoi a-t-il plusieurs voitures, dont la moins chère coûte 50 fois plus que ma Ford Escort qui n’est plus côtée à l’argus ?
5- Nous sommes aussi découragés de voir que toute une partie de notre travail, au combien capital n’a pas la moindre reconnaissance ! Car même si elle fait faire de grandes économies à la société, elle n’a aucune reconnaissance dans tous les systèmes de cotation à la « con » et je pèse mes mots car mon expérience des dossiers russes (où l’enfant est un malade que la bonne médecine soviétique va guérir) me montrent notre régression. Passer une demi-heure à rassurer une famille après un malaise ne rapporte rien, alors que lui prescrire des examens sans intérêt…. Passer des jours à revoir une famille adoptive au bord de la rupture pour arriver à renouer les liens et à repartir sur de bonnes bases si cela peut éviter un placement permet d’éviter un coût de plusieurs centaines d’euros par jour à nôtre société (c’est le tarif d’un enfant en institution), mais cela ne rapporte rien à mon service et à mon CHU.
6- Enfin je rappelle que la passion est là, et avec l’affection que nous avons pour nos petits patients et qu’il n’y a pas beaucoup d’autres choses qui nous tiennent à l’hôpital.

Première fois que je participe au site de discussion, excusez mes aigreurs, et bien amicalement à tous amis pédiatres.
Je me trompe peut-être de combat pour la grève de demain, mais pour une première fois il fallait bien plus que des motifs CGT de pseudo défense du service public pour me motiver…

JV de Monléon – CHU de Dijon

jeudi 9 octobre 2008

"C'était pas l'adoption Maman !"

Pas mal de consultations en ce moment, et comme toujours beaucoup de témoignages.

L'un d'entre eux m'a particulièrement touché, une maman me raconte la maladie grave de son enfant, maladie rare, un peu mystérieuse qui n'a rien à voir avec l'adoption. Pourtant quand les symptômes ont commencé à l'adolescence, c'est à cela que beaucoup d'intervenants ont pensé devant la fatigue du jeune homme : il est ado, il est adopté, c'est forcément une dépression.
Quand de nombreux mois après, la maladie est enfin diagnostiquée, c'est une des premières choses que dira ce grand garçon à sa maman: "C'était pas l'adoption Maman !". Comme une délivrance, malgré le difficile diagnostic, que l'on ne nie plus sa filiation.

Dans le même style, l'histoire d'un petit bonhomme qui m'a suffoqué. Il va bien comme un petit garçon de 7 ans. Il vit bien son histoire d'adoption, il la connaît mais ça ne l'obsède pas. Il est un peu jaloux de sa petite soeur, aimerait parfois avoir son papa et sa maman rien que pour lui .... un petit bonhomme comme beaucoup d'autre !
Pourtant lorsqu'il est hospitalisé pour un petit souci, les médecins n'oublient pas de rappeler à ses parents qu'il est adopté. Pour eux, cela veut dire qu'il y aura des problèmes, que cela va "sortir", il vaudrait même mieux que cela sorte maintenant plutôt qu'à l'adolescence. Aussi il lui est prescrit du Laroxyl, un antidépresseur ! On croit rêver !
Ce serait presque risible, si une fois encore cela ne témoignait de la place de l'adoption et des enfants adoptés dans notre société ! Ils sont trop souvent enfermés dans un statut dans des lieux communs qui ne sont les leurs....