Ce billet est à lire, après avoir lu le
précédent.
Je ne pouvais pas laisser passer le premier
avril et si cette année, je n’ai pas osé un grossier canular comme d’autres années, j’ai
laissé trainer mes oreilles dans un salon de coiffure.
Quelques précisions, tout d’abord, mille
pardons sincères à toutes les coiffeuses, le sort est tombé sur leur profession,
même si cela fait au moins dix ans, que je ne suis pas entré dans un salon de
coiffure, cette profession est célèbre (entre autres choses) pour les journaux
qu’on y trouve en attendant, et par le fait que la professionnelle qui s’occupe
de vous, craignant votre ennui pendant qu’elle réalise votre « rinçage » va vous
abreuver de parole.
Je dis rinçage plutôt que coupe, shampooing ou
permanente, car j’ai appris ce terme récemment grâce à un de mes oncles, allant
pour la première fois chez un coiffeur qu’il ne connaissait pas, à la fin du
shampooing celui-ci lui demande : « je vous fais un rinçage ? », mon oncle
pensant (tout comme j’aurai pensé), il est crétin celui-là, il me demande s’il
doit me rincer les cheveux, il va pas me laisser la mousse sur la tête quand même, lui répond (comme
j’aurai répondu) : « ben oui bien sûr ! », depuis et pour quelques semaines, il
a une magnifique coiffure aile de corbeau qui le fait ressembler à un vieux beau
sur le retour, et a perdu sa magnifique toison poivre et sel…. Car pour les non
initiés (ce que j’étais il y a encore quelques jours) un rinçage, c’est une
coloration ! C’était la blague du jour.
Laissons les coiffeuses, en m’excusant encore,
car si certaines ont pu dire de telles horreurs, j’espère la plupart plus
respectueuses et réfléchies, et d’autres professions à commencer par des
médecins, ne se gênent pas pour dire de telles choses, sans forcément en savoir
plus… par contre les médecins ne font pas de rinçage, et on peut plus leur
reprocher de ne pas assez prendre le temps d’entendre et de parler !
Je voulais ainsi faire part de mon inquiétude, par rapport au ressenti que doivent avoir certaines personnes qui ne connaissent rien à l'adoption, après certaines émissions, articles, déclarations.
Pas trop grave que ce soit repris chez la coiffeuse, dans la cour de récré ça m'embête bien plus.
Là je vous ai fait la version "ça marche pas c'est tout la fôte aux adoptés", j'aurais pu vous faire la version "ça marche pas c'est tout la fôte des adoptants", voir la version "l'adoption c'est trop chou", sachant que ce serait trop simple si c'était aussi simple, ne reconnaître qu'une de ces versions serait du militantisme... et je m'avoue ravi, quand je m'en prends plein la gueule de tous les côtés.
Quand, en même temps (et très récemment), certains (qui manifestement ne me connaissent pas bien), me reprochent de refuser d'admettre que des adoptions aient pu se faire de façon malhonnête et ne sont pas des réussites, et qu'en même temps mes amis de l'arche de Zoé (qui me connaissent bien) me reprochent de ne pas les oublier ; quand on me critique de parler de facteurs de risque dus aux parents et qu'en même temps, on me reproche de défendre les parents des enfants du séisme, je me dis que je suis à la bonne place et je n'en change pas.... à croire que j'aime les coups... le rugby doit me manquer !
Venons en au fait, et
à la grande offensive que subit l’adoption en ce moment.
Dans vos commentaires depuis quelques mois,
beaucoup d'entre vous se sont (justement) indignés du sort réservés à l'adoption
dans les médias, dans les discours de certains politiques.
Une émission télé que je n'avais pas envie de voir, mais vous m'en avez tellement parlé, que je me suis enfin décidé à la voir, a fait très fort :
une espèce d'embrouillamini, de salmigondis où on trouvait de tout, au choix de
l'adoption, du parrainage, de l’orphelinat français, de la famille exemplaire
aux US qui recueille tous les délaissés, et une autre famille (toujours aux US)
qui recueille les délaissés, parce qu'ils sont pédophiles !
Pour résumer, seul
PLS avec une position assez sobre (comme l'a déjà dit l'un d'entre vous) a dit
des choses assez justes et d'actualité. Quitte à me faire critiquer, en dehors
de « sa période haïtienne » que je ne comprends toujours pas, c’est quelqu’un
qui dit le plus souvent des choses vraies sur l’adoption.
Il y a eu aussi, je l’ai déjà dit, un article
dans la Croix, journal traitant habituellement de l'actualité avec du recul,
mais là qui a fait un peu du sensationnalisme, et qui vous a fait aussi
réagir.
... il y en a eu d'autres, et malheureusement il y en aura d'autres.
Et, vous avez eu raison de réagir, l'adoption
n'a jamais été en odeur de sainteté, mais là, cela a tendance à atteindre des
sommets.
Sur le plan politique, il y a toujours eu une
méfiance vis-à-vis de l’adoption, surtout internationale… à droite, certains
sont pas loin de penser que c’est une forme d’immigration clandestine, tandis qu'à gauche, on a toujours peur de faire
du colonialisme.
Sinon, j'ai essayé de
recenser certaines causes de ce dénigrement (vous pouvez me faire part de vos
idées) :
- L’arche de Zoé,
encore et toujours, je crois que nous ne sommes pas au bout de nos peines. Ces individus ont fait un mal fou à l'adoption et quand on entend que le procureur aurait dit à certains d'entre eux, qu'ils étaient des braves gens, on croit halluciner, toutes les preuves existent, ils se sont même filmés faisant leurs exactions.
Pour l'homme de la rue, l'Arche de Zoé, ça ressemble à une adoption banale... et finalement, c'est peut être dommage que ça n'est pas marché, ben voyons.
- Le rapatriement des
enfants haïtiens, on n'y reviendra pas, mais si tout n'a pas été parfait, rien n'est jamais parfait de toutes façons, la couverture médiatique et certaines mesures administratives (le fameux sas en particulier) ont été catastrophiques.
- Le "danger" de
l'adoption plénière, où d'aucuns continuent avec le fantasme, qu'elle interdirait à un enfant de retrouver sa famille bio et d'avoir des liens avec elle : ce qui est un faux grossier. Pour avoir parlé pas mal de cela avec des magistrats, je crois que finalement, ils sont plus effrayés que véritablement opposés.... ils sont souvent trop carrés, et l'adoption plénière qu'il voit comme un faux légalisé leur fait peur !
Je crois que la solution serait qu'il n'existe qu'un mode d'adoption qui permettent aux adoptés d'avoir les mêmes droits et protection que les autres... qu'on ait plus à choisir... et que mon rêve de "l'adulte qui compte" (beau-parent, grand-parent, tuteur) trouve sa place, pour d'autres enfants.
- Le mariage pour tous
: il y a une grosse dizaine d'années, j'étais tout débutant dans l'adoption, ma consultation faisait ses premiers pas... et j'étais étonné par le discours de certains personnages (qui ont depuis disparus, atteints sans doute par la limite d'âge), violemment contre l'adoption, véritablement contre, rien à voir avec ceux que nous avons critiqués qui étaient contre le rapatriement des petits haïtiens (qui sont des gens favorables à l'adoption... mais qui ont dû avoir à ce moment là une "absence"). Ces vieux personnages disparus, s'ils affirmaient n'être que contre l'adoption internationale ou l'adoption plénière, n'osaient dire qu'ils étaient contre l'adoption en général. Leur discours était parfois très violent, parlant de déportation, etc...
Par contre, et c'était là tout mon étonnement, ils se déclaraient pour l'adoption homosexuelle, et un "vieux" copain président d'APPO (ce n'était pas Bernardo, un autre copain), m'avait alors exprimé son opinion : "En fait m'avait-il-dit, l'adoption par les homosexuels, ils n'en ont rien à faire, mais ils savent que si elle est acceptée, cela révolutionnera l'image de l'adoption, la société n'est pas prête, et ne verra alors dans l'adoption qu'un moyen de rendre service à des adultes, alors que son but premier est le contraire". Je me suis rappelé de cette "prédiction" et je me dis qu'il y a du vrai.
Comme l'avait dit les conclusions du CSA pour ce débat, la crainte que l'adoption ne soit plus considérée comme donnant une famille à un enfant, mais bien le contraire.
Actuellement les gens qui sont contre l'adoption jubilent, et plutôt que de voir les problèmes dans leur ensemble, le journalisme ne cherche pas à s'élever et fait dans le sensationnel, on parle de tout et de n'importe quoi. On montre la douleur, le sentimalisme, etc...
Et si tout adoptant a le droit de raconter (même à la télé) son histoire, si tout adopté (encore plus) a le droit de parler de son expérience, s'il est toujours utile de dénoncer les adoptions illicites, s'il est toujours intéressante de connaître une nouvelle histoire ... si certains aimeraient bien dire que les adoptions dont on parle datent d'il y a 30 ans... l'arche de Zoé, ce n'est pas si loin que cela... c'est la généralisation (encore elle) par de piètres journalistes qui me déçoit. Parce que quand une histoire, qui existe bien, mais qui reste une histoire unique (car chaque histoire est unique) est présentée comme la panacée, on en parle chez la coiffeuse, mais surtout Dylan ne va pas manquer de dire à Kevin que ses parents sont des voleurs d'enfants, ou que c'est bien que grâce à de tels bienfaiteurs, il ait pu sortir de la misère.
Enfin, moi c'que j'en dis, n'importe comment !