vendredi 30 octobre 2009

Le jour où j'ai rencontré le Père Pedro



Je vais vous parler de la première rencontre qui m'a bouleversé pendant mon voyage à Madagascar, cela faisait seulement quelques heures que j'avais débarqué et j'ai eu l'immense immense honneur de rencontrer un homme exceptionnel.

Essayez d'imaginer que vous pouvez passer quelques instants avec quelqu'un que vous admirez, quelqu'un qui est pour vous un modèle, quelqu'un qui réalise des choses inimaginables, et vous comprendrez ce que j'ai ressenti.
Pour moi cela aurait pu être Thierry Dusautoir, David Lodge, JMG Le Clézio ou Bono, un excellent rugbyman, un écrivain débordant de talent, ou une rockstar humaniste et talentueuse. J'ai vécu bien mieux que cela, j'ai pu rencontrer : le Père Pedro. J'ai pu parler quelques dizaines de minutes avec lui, j'ai même quelques photos avec lui et des enfants. Ces enfants malgaches qui comptent tant pour lui pour lesquels il a déplacé des montagnes, au sens figuré mais aussi au sens propre. Certaines collines autour d'Antananarivo sont marquées par le Père Pedro, parce qu'il y a fait creuser des carrières pour subsister ou parce qu'il y a construit des villages.

Le Père Pedro n'est pas encore très connu en France, et pourtant, et pourtant.... Vous savez, ou vous vous doutez que je suis un catho, un catho qui aime plutôt le concret, l'action plus que l'oraison (je disais auparavant que je comprenais mieux Mère Térésa que Sainte Thérèse de Lisieux, mais je ne connaissais pas assez la petite Thérèse). Dans la religion, dans l'action, Père Pedro c'est du concret de chez concret ! Mon admiration pour lui n'est pas due à une concordance religieuse mais parce que je suis tout simplement époustouflé par ce qu'a pu réaliser ce bonhomme. Cet homme est chaque année un des favoris pour le Nobel de la Paix, je crois qu'il s'en fiche, sauf que la somme remise au lauréat lui permettrait d'acheter quelques tonnes de riz ou de ciment et que la notoriété supplémentaire permettrait de récolter plus de fonds. Si vous voulez en savoir plus sur ce personnage exceptionnel allez là.
Ou encore mieux lisez ces livres : "Pere Pedro - Combattant de l'espérance - autobiographie d'un insurgé" éditions J.C. Lattès, 2005, et "Pere Pedro - Journal de combat" éditions J.C. Lattès, 2008. Attention vous ne sortirez pas indemne d'une telle lecture.
Il aide des gens à vivre mais surtout à vivre debout avec un travail, avec dignité, sa grande fierté c'est le nombre d'enfants scolarisés, le nombre de bacheliers. Comme ce sont les plus fragiles qui sont accueillis beaucoup de femmes, encore plus d'enfants, sans les hommes (qui ont baissé les bras, abandonnant leurs famille) Akamasoa a besoin de votre aide et pour cela, il faut aller là.

J'avais pu récolter du matériel médical, des appareils à tension, un appareil à faire des Electro Cardio Gramme, grace à l'intelligence de la responsable de l'Etablissement Français du Sang qui plutôt que jeter ce matériel réformé mais en bon état se doutait qu'il pourrait servir à d'autres ! Ma petite famille avait aussi vider les placards de nombreux petits jouets. J'étais donc chargé comme un âne, à la limite du maximum autorisé par Air Mada... J'avais prévenu de mon arrivée avec ce matériel et j'ai débarqué à Akamasoa le lundi après-midi. J'ai pu enfin vider ma valise, dont le contenu a été bien accueilli, des permanentes et volontaires du village me l'ont fait visiter. On est frappé par la sérénité de ce lieu, sa dignité (encore une fois ce mot qui colle tant à l'endroit). J'ai pu visiter l'école maternelle, l'atelier de broderie, le stade, le magasin.

Et puis, au bout d'un moment, j'ai vu arriver le Père Pedro. Un physique de force de la Nature, une voix rocailleuse avec un accent slovéno-argentin inimitable, des formules qui font mouche : "450 élèves de maternelle en trois classes qu'est ce que vous en dites docteur, en France, je serai en prison pour cela !" "C'est l'Esprit-Saint qui me guide, l'Esprit-Saint depuis 20 siècles on aimerait le formater, mais on n'y arrive pas, il est sans arrêt en mouvement, on aimerait lui dire : ééééh arrête un peu, mais on n'y arrive pas, il bouge sans arrêt".

Nous sommes sortis pendant la récréation des petits de la maternelle, et avons été entouré par une nuée de petits sourires et la passion est réciproque, ils étaient tous à se précipiter autour de Père Pedro à l'appeler "Monpera, Monpera" (mon père) et lui était rayonnant, son discours sur les enfants et sa motivation qui tient grace à eux sont sources d'espoir. J'ai eu quelques miettes : des sourires, des "Monpera" aussi pour moi, ce qui a beaucoup fait rire le vrai père. Et un petit malin qui m'a tendu ses bras en courant avec un si beau sourire, j'ai craqué et il s'est retrouvé dans mes bras d'où il pouvait toiser les copains.

Nous avons aussi parlé un peu d'adoption, la position de la communauté d'Akamasoa ne m'a pas surpris, et elle est logique avec tout ce qui se fait là-bas. On préfére "adopter des familles entières" et confier l'enfant qui n'a plus ses parents à la famille élargie, la communauté, ce qui dans cette structure est la meilleure solution. Nous avons aussi pas mal parlé de l'Arche de Zoé, son indignation m'a fait plaisir.

Et puis j'ai dû partir, je ne vous dis pas à quels points ses encouragements à continuer mon boulot m'ont ému.

Il y a des jours comme cela, des jours que l'on oubliera jamais.

8 commentaires:

Anne a dit…

J'ai lu son livre "Combattant de l'espérance" et il m'avait beaucoup plu. Le monde (et l'Eglise) ont besoin de témoins de cette trempe et vous avez beaucoup de chance de l'avoir rencontré...
En Inde, du même style, j'aime beaucoup le Père Ceyrac (sj), et ici en France Henri Quinson (moine en cité).

Anne

Anonyme a dit…

Malgache d'origine, j'ai eu l'occasion de passer une fois à Akamasoa. Je n'ai pas eu la chance comme vous de voir le Père Pedro mais en revanche, ce que j'ai vu m'a tout simplement .... époustouflée .... Ce qui a été construit bien sûr et surtout le nombre d'enfant scolarisés... Je les ai vu au réfectoire moi...
Eh oui, quand on est face à du "concret" comme cela, on en reste marqué à vie...
Et je ne puis qu'encourager ceux qui veulent soutenir les actions de ce "bon-homme" car c'est du "vrai"...

TiBihan a dit…

J'ai vécu mon adolescence à Mada où le père Pedro est une légende. Qu'un seul homme ait pu créer un tel dynamisme, incarner un tel changement pour tant de personnes, c'est bouleversant.
Merci pour cette piqure de rappel et ces photos de ce pays cher à mon coeur.

Moushette a dit…

Quelle belle rencontre ! 10 dix minutes peuvent changer ou transformer une vie, au pire rebooster les batteries pour qqs années de plus ! Ce ne sont pas forcément les mots, les courts échanges. Il y a aussi l'Energie, qui passe, que l'on reçoit sur son âme et qui nous recharge pour nos modestes travaux à nous. Moi je la reçois souvent via des "modestes" en Inde, qui tentent de déplacer des montagnes avec un cuillère à moka, sans se décourager...

Nul doute que ce Père rayonne bien au delà de vos convictions religieuses, vous avez eu de la chance de le croiser sur votre orbite...

Mamaucy a dit…

Merci pour ces beaux récits de voyage, ces photos évocatrices et ce "shoot" venu de loin, pays de tant d'enfants qui grandissent ici.
Maya

Catherine a dit…

Quelle émotion,à la lecture de votre voyage.Nous nous sommes retrouvés transportés il y a quatre ans.
Nous avons assisté à la messe du Père Pedro avec notre chéri d'amour et la directrice de notre centre.A l'issue de la cérémonie,il a bénit notre toute nouvelle famille,pour les bons et aussi les difficiles moments que nous pourrions avoir.Depuis,j'ai lu ses livres,et dans mon coeur reste gravé ce moments hors du temps.Eh oui,il est des jours extraordinaires!!

Anonyme a dit…

quelle chance et quelle émotion ce doit etre de rencontrer le Père Pedro
Son action est magnifique
je vais vite acheter ces livres
racontez nous encore!
Claire

Mimi a dit…

Bonjours JVM ! A propos de livre; cela peut vous intéresser. "Thérèse Teresa la passion en héritage" de Perle Scemla. 2 bios parallèles !!! Bonne journée,