lundi 6 juillet 2009

La bonne méthode pour permettre une reconnaissance des consultations d'adoption.

J'ai lu ces jours-ci un article paru dans une revue américaine très prestigieuse spécialisée dans les pathologies infectieuses. Cet article m'a scandalisé.
Il ne disait pourtant que des vérités mais donnait sur les enfants adoptés une image que je n'aime pas du tout, dans le style : "ils nous amènenent que des saloperies !"

Cet article reprenait plusieurs histoires d'épidémies plus ou moins importantes (tuberculose, hépatite B, etc) transmises par des enfants adoptés. Même si les cas présentés étaient bien réels, la façon dont ce papier était présenté pouvait faire croire que les adoptés étaient une source permanente de maladies pour la pauvre population des pays d'accueil. Ce n'est qu'après l'avoir lu que j'ai regardé le nom de l'auteur, je m'attendais à lire le nom d'un vilain docteur raciste anti adoption, et à ma grande surprise l'auteur n'était autre que Laurie Miller. Je ne connais cette dame que par ses écrits, mais c'est une des pionnières des consultations d'adoption avec celle qu'elle a créée à Boston.
Après réflexion, je crois qu'elle a fait un article utilitaire pour demander des moyens, et elle a peut-être trouvé la bonne méthode.

Malgré des promesses, il y a un mépris depuis des années pour les consultations d'adoption, au mieux j'ai entendu "c'est bien ce que vous faites, continuez, continuez !" ce qui veut dire "puisque vous faites déjà un excellent boulot, que vous aidez pleins de famille, que vous avez fait ce choix au dépens de votre sommeil, de votre famille et bien pourquoi voulez vous que je vous aide ?"
J'ai entendu mieux de la part d'un haut responsable de la Direction Générale de la Santé, elle va vous plaire : "Puisque les parents adoptés sont allés les chercher ils n'ont qu'à assumer !". Ben voyons, on va dire pareil pour les enfants qui ont des cancers, ceux qui sont autistes, ceux qui ont une thyroïde qui ne marchent pas et puis tout ira bien.

Je passe sur les différents croche-pattes et magnifiques coups de poignard dans le dos de certains qui trouvent votre boulot intéressant et efficace, mais qui aimeraient tellement mieux qu'on le fasse cela pour leur gloire et qui n'apprécient pas que vous vouliez rester indépendants !
J'aurais de quoi être bien déprimé si j'en avais le temps !

Ceux qui parmi vous sont des fidèles (et anciens) lecteurs, savent bien qu'à défaut d'être déprimé je suis parano (on a les psychoses qu'on peut !), mon fidèle vautour ne rate pas une occasion de le rappeler.
Et, on peut se demander pourquoi je râle, je viens par exemple pour début 2009 de battre sans faire exprès un nouveau record avec 330 consultations d'adoption en 6 mois. Mais je vois aussi que la fin de l'année va être difficile car une fois encore je vais devoir assurer l'absence de collègues (et au lieu de consacrer 50% de mon temps aux petits adoptés, je vais en consacrer 30%) je vais devoir refuser des interventions, diminuer mon nombre de rendez-vous, avoir encore plus de retards pour mes différenst courriers. Mes beaux projets d'école des parents vont rester dans les placards et toutes les publications que ce soit des beaux articles scientifiques, un nouveau livre que mon gentil éditeur attend depuis 4 ans, les messages de ce blog seront en sommeil profond.

Si, un jour, on m'accorde enfin d'avoir plus de temps, cela ne me permettra pas de me coucher plus tôt, ni même de voir un peu plus souvent les frimousses que j'aime bien et qui m'attendent à la maison. En ayant 100% de mon temps consacré à l'adoption, ou en ayant encore mieux une petite équipe autour de moi, je peux vous dire que cela "dépoterait" : que vous n'attendrez plus des mois pour que je réponde à vos appels au secours depuis la Russie pour avoir un avis rapide sur la santé du babou qu'on vous propose, et on verrait qu'avec un peu de moyens certains français ne sont pas si mal pour lancer des recherches scientifiques.

Cela coûte cher ce beau projet mais chaque année grace à notre travail de fond auprès de certaines familles nous empêchons au niveau de la consultation au minimum 3 placements. C'est à dire que nous arrivons à recoller les morceaux entre parents et enfants, et qu'un éclatement de la famille n'est plus envisagé. Prix d'un enfant en institution en France : environ 400 euros par jour, x 365 x 3 enfants par an = plus de 400 000 euros, de quoi payer à plein temps un docteur, une secrétaire, une psychologue, une puericultrice et il en restera même un peu !
Je ne parle pas du bonheur que retrouvent ces enfants, je ne parle pas du bonheur que retrouvent ces familles, tout le monde s'en fout (cynique ce soir). Je ne parle pas du bonheur que j'ai quand je vois ces familles à nouveau repartir sur de bons rails. C'est purement égoïste et cela n'intéresse pas nos spécialistes du budget. Je pense toutefois que la pire chose pour un individu c'est d'être abandonné une deuxième fois et avec ou sans moyens je me battrai toujours contre cela. Pas pour la gloire, ce ne sont pas ces histoires-là que l'on raconte, mais parce quand on est arrivé à un tel résultat, je peux vous dire que l'on est heureux, paisible, on trouve le sommeil en 10 secondes. Joie egoïste, c'est cela qui me fait avancer rien d'autre, mais la joie d'un médecin cela ne rapporte rien........... manquerait plus qu'on lui paie en plus !
Je ne vous parle pas non plus des épidémies que nous avons évité !

Pourtant je le devrais ............

Donc ne vous étonnez pas, si vous voyez arriver des articles du "nouveau" docteur JVM, ne parlant que des soucis de nos petits adoptés, généralisant à outrance leurs maladies contagieuses ou dangereuses, leur incapacité à trouver leur place dans notre société. Cela fera du mal à l'adoption en général, cela n'aidera pas les petits adoptés à trouver leur place, mais peut être les autorités (qui ont le pouvoir) enlèveront les oursins dans leurs portefeuilles !

Fin de la rage du jour !

4 commentaires:

z e n c h a dit…

... J'ai entendu mieux de la part d'un haut responsable de la Direction Générale de la Santé, elle va vous plaire : "Puisque les parents adoptés sont allés les chercher ils n'ont qu'à assumer !" ...

Entendu aussi : "Aux spécialistes de la santé physique et psychique de rattraper les dégâts divers ...".

Léoléo44 a dit…

Je suis une lectrice assidue de vos chroniques. Elles ont autant d'aides précieuses et d'encouragements, pour tous les parents et futurs parents adoptifs.
Un grand merci encore de consacrer de votre très, très précieux temps à échanger, à nous parler.
En visionant récemment le documentaire d'Andréa Negrelli "De l'enfant rêvé à l'enfant réel", on mesure les progrès faits depuis 20 ans dans l'information des parents adoptifs et l'accompagnement des adoptés... Même si beaucoup reste à faire, c'est grâce à l'énergie de gens comme vous que la cause des enfants adoptés avance !
1000 mercis pour eux... et pour nous aussi.

Framboise a dit…

ça serait tellement dommage d'en arriver là...tellement frustrant...
Mais que faire ?

Moushette a dit…

Je reconnais bien cette rage, car elle est assez récurrente chez nous aussi, les malheureux bénévoles d'OAA en train de ramer sur un fragile radeau à contre-courant...

... surtout après l'ouverture de l'enveloppe des méga subventions promises par Rama Yadé. Même pas de quoi s'acheter une rame, dommage.

(que 3 commentaires à ce billet ???!!)